BRASSENS ANARCHISTE, présentation du livre le mardi 12 décembre 2023 au Centre Ascaso Durruti dès 19h 30 au 6 rue Henri René 34000 Montpellier

Le parcours politique méconnu de Brassens
L’ouvrage propose de se pencher sur un aspect peu fréquenté de la personnalité riche et attirante de Georges Brassens : ses liens avec l’anarchisme, à travers sa participation aux activités de l’organe de la Fédération anarchiste, « Le Libertaire » (en 1946-1948), et son engagement qui se poursuit sous d’autres formes quand il quitte le journal, y compris une fois le succès arrivé. Il s’agit aussi de replacer le parcours politique de Brassens dans l’histoire de l’anarchisme et de ses différents courants et de chercher dans ses chansons, y compris celles où il met en musique des poèmes d’autres auteurs, les traces de cet engagement.

Isabelle FELICI, professeure en études italiennes à l’université Paul-Valéry, viendra présenter le livre « Brassens anarchiste » (éditions Atlande, 2023) qu’elle a écrit avec la participation de Frédéric Bories, Sylvain Boulouque, Pippo Gurrieri, Cédric Perolini et Anne Steiner.

http://ascaso-durruti.info/

Paul SIGNAC et la Méditerranée le vendredi 1er décembre 2023 à 17h30 à la librairie Prado Paradis par C. Longbois-Canil

Paul Signac et la Méditerranée.

En novembre 2021 paraissait une co-édition Gallimard-Musée d’Orsay du Journal jusqu’ici inédit de Paul Signac (1863-1935). Couvrant les années 1894-1909, ce journal débute alors que l’artiste est installé à Saint-Tropez depuis deux années. Le village lui inspirera, entre autres, des toiles comme Voiliers dans le port de Saint-Tropez (1893), La Bouée rouge (1895) et Le Pin Bertaud-Gassin (1909). Navigateur et cycliste chevronné, Paul Signac s’enfonça dans les terres et prit souvent le large. Les pages de son journal retranscrivent les multiples impressions que laissèrent les paysages sur sa rétine et son âme d’artiste. Loin des sollicitations de la métropole, sans s’en couper pourtant puisqu’il passe le plus souvent ses hivers à Paris, Paul Signac médite sa peinture, elle est au cœur de ses pensées ; un rien, une lumière, un coin ombragé, un motif quelconque, une houle par temps de mistral captent son regard et ne cessent d’interroger sa pratique picturale. Le journal devient alors une plongée intime dans le processus créatif de l’artiste et le montre en train de se dégager peu à peu du message de Seurat pour appliquer plus librement la technique de la division des couleurs.

L’histoire singulière du Journal s’inscrit également dans une plus vaste histoire, celle de la Troisième République. À travers ces pages, c’est aussi le temps des lois scélérates et de la répression de l’anarchisme, de l’affaire Dreyfus, des scandales politiques mais aussi de la vie intellectuelle et culturelle d’une époque qui défilent sous nos yeux. L’écriture est vive, libre et entière, sans complaisances. Au fil des jours, le récit d’une vie, d’une pensée se déroule et se frotte aux événements de son temps, au quotidien d’une vie tropézienne et varoise, aux surprises et aux désagréments des mondanités et, bien plus encore, aux mystères de l’art. 

Parcourir les pages du Journal de Paul Signac et les associer aux œuvres réalisées durant cette période, c’est éclairer le parcours d’un peintre mais c’est aussi à travers les anecdotes, les humeurs, le regard acéré sur l’actualité et ce qui l’entoure la possibilité de découvrir la personnalité d’un homme engagé tant sur le plan artistique, politique qu’humain, au plus près de ses contradictions, de ses doutes et de ses fulgurances.

* * *

Christophe LONGBOIS-CANIL est docteur en esthétique, diplômé d’histoire de l’art de l’université de Roma III et chercheur indépendant, spécialiste du concept de modernité – il a publié à ce sujet De moderne à modernité, les généalogies d’un concept aux éditions Klincksieck – et de la critique d’art au XIXème siècle, pour laquelle, il a collaboré, entre autres, à l’édition des Œuvres complètes d’Albert Aurier (publiée en juin 2021) et des Œuvres complètes de Félix Fénéon (encore en préparation) aux Éditions du Sandre. Il travaille actuellement sur le peintre néo-impressionniste Maximilien Luce sur lequel il finalise un essai intitulé Maximilien Luce et la Commune de Paris.

19 avenue de Mazargues 13008 Marseille – 04.91.76.55.96.

SABOTONS LA GUERRE ! Appel à une mobilisation internationale et internationaliste contre la guerre en Ukraine

2023/10/04 

antimilitarismus

Nous publions à présent (et en plusieurs langues, comme très souvent) un appel à une mobilisation internationale et internationaliste contre la guerre en Ukraine provenant de camarades anarchistes en Italie. Nous adhérons globalement à ce texte très intéressant qui tente de donner une direction à l’ensemble des multiples initiatives locales qui vont dans le même sens d’un refus, dans une guerre qui oppose des nations capitalistes entre elles, de choisir un camp bourgeois contre un autre, un « moindre mal » contre ce qui nous est présenté comme « le pire » ou même « le mal absolu ».

Néanmoins, il existe quelques points de désaccords dont nous voudrions formuler ici une très brève critique. Il y a en effet des « éléments de langage » qui ressemblent quelque peu à ceux utilisés par la propagande de guerre du Kremlin et parfois également des arguments que nous n’utiliserions pas, comme par exemple les mesures répressives contre la communauté russophone en Ukraine, le fait que les nazis et les fascistes sont très présents et puissants en Ukraine, etc. Bien sûr, tout cela est objectivement vrai, mais comme le vrai est un moment du faux, il peut également tendre (sans même que ceux qui affirment « certaines vérités » en aient conscience) vers un renforcement objectif de la totalité du faux. Bref, plutôt que d’utiliser des arguments de nos ennemis de classe, même si ces éléments recouvrent des moments réels, il eut mieux valu développer, clarifier et renforcer nos propres consignes, notre propre compréhension de ce tourbillon guerrier qui risque d’emporter l’humanité vers le néant et sa perte. Nous tenons à remarquer que tous ces « éléments de langage » pourrait malheureusement déforcer les éléments de force qui sont produits par cet appel à la mobilisation et la volonté (et nécessité) de s’organiser contre les deux camps.

Un autre bémol que nous voudrions mettre ici en avant, c’est le fait que le texte se limite à ne parler que d’« arrêter la guerre », d’« imposer la cessation des hostilités par le bas », de « mettre un terme au carnage en cours » ou de « mettre fin au massacre », des déclarations qui pourraient facilement conduire à une position pacifiste et à un souhait de revenir au statu quo ante… d’avant la guerre, bref à une situation en temps de « paix » contre le temps de la « guerre »… alors qu’en temps de « paix », donc de paix sociale, le capital est en guerre permanente contre notre classe, contre l’humanité et que nous sommes concomitamment en guerre de classe contre nos exploiteurs. Seule exception à ces déclarations qui pourraient inspirer plus d’un pacifiste, le mot d’ordre final qui appelle à « transformer la guerre des patrons en guerre contre les patrons », ce qui est bien ce pour quoi nous nous battons : transformer la guerre militaire, la guerre contre notre classe en une guerre sociale, une guerre de classe dirigée par nos initiatives et nos offensives, une lutte et une guerre pour le communisme !!!

Dans ce sens, nous voudrions également souligner un point très fort parmi d’autres : « Lorsqu’un Etat fait la guerre, cet Etat fait aussi la guerre à sa propre population, et en particulier à ses propres prolétaires. La guerre renforce toujours le pouvoir des classes dirigeantes, en renforçant l’asservissement et l’exploitation des opprimés. » Et par conséquent, nous devrions insister sur le fait que le prolétariat n’a pas d’autre possibilité que de mener sa guerre sociale contre sa propre bourgeoisie…

Nous pourrions développer ici d’autres désaccords, tels que la vision que les camarades ont de « la résistance partisane » durant la seconde guerre mondiale qui pour nous est beaucoup plus complexe que leur approche simplifiée telle qu’ils le déclarent. NON ! nous ne partageons pas leur vision selon laquelle « les combattants partisans étaient des déserteurs qui luttaient contre l’armée officielle de leur propre État » ou encore que « la participation à la lutte armée des partisans était libre et volontaire ». Pour faire simple, disons que « la résistance partisane » était répartie entre les forces politiques traditionnelles (donc bourgeoises) défendant soit la république, soit la monarchie, et d’un autre côté il y avait toute la puissance dominante du stalinisme (et du trotskysme qui soutenait l’URSS de manière « critique », c’est-à-dire un camp bourgeois contre un autre) pour encadrer d’éventuelles initiatives autonomes de réseaux prolétariens qui très vite seront vidés de leur substance subversive au profit de la fausse polarisation bourgeoise fascisme versus antifascisme…

Saluons au passage « les combattants partisans [qui] étaient [vraiment] des déserteurs [et] qui luttaient contre l’armée officielle de leur propre État », c’est-à-dire les prolétaires enrôlés de force sous l’uniforme irakien ou iranien et qui pendant la terrible guerre qui dura huit longues années de 1980 à 1988 organisèrent des centaines de mutineries, de désertions collectives, d’actions de fraternisation et qui se rassemblèrent dans la région des marais pour lutter contre les deux camps, contre les deux nations capitalistes, pour mettre en avant notre seule réponse de classe face à la guerre : l’internationalisme et la lutte pour le communisme !!!

Guerre de Classe

Sabotons la guerre !

Appel à une mobilisation internationale et internationaliste contre la guerre en Ukraine

Source en italien : https://ilrovescio.info/2023/09/12/sabotiamo-la-guerra-appello-per-una-mobilitazione-contro-la-guerra-in-ucraina/

La guerre qui se déroule actuellement en Ukraine est plus qu’un autre conflit militaire, et il ne s’agit pas simplement d’un différend sur les ressources. Il s’agit plutôt d’un chapitre crucial d’une rivalité plus large entre des blocs de pays capitalistes qui se battent pour le contrôle du monde. La suprématie économique, militaire et technologique, ainsi que l’équilibre géopolitique mondial, sont en jeu dans ce conflit. En effet, alors que les combats en Ukraine se poursuivent depuis plus d’un an et demi, la perspective d’une confrontation militaire avec la Chine, principal ennemi du capitalisme occidental, devient de plus en plus tangible. Il ne nous semble pas excessif ou alarmiste de dire que nous sommes sur une pente glissante qui pourrait conduire à la troisième guerre mondiale.

Pour la première fois depuis la Seconde Guerre mondiale, une guerre symétrique se déroule en Europe, avec un risque réel d’escalade nucléaire. Il s’agit également du premier conflit direct entre la Russie et l’OTAN, impliquant les principales puissances nucléaires du monde (Fédération de Russie, États-Unis, Royaume-Uni, France).

La guerre a toujours été un instrument de restructuration économique utilisé par le capitalisme en temps de crise. Aujourd’hui, elle s’accompagne à nouveau de ces politiques d’interventionnisme de l’État, si appréciées par la gauche, qui ont déjà précédé les conflits mondiaux. La guerre est la forme la plus radicale d’oppression exercée par les États et les capitalistes contre les exploités. Pour ces raisons, nous pensons que le conflit en cours est une attaque directe contre tous les prolétaires.

Cette guerre, qui a débuté en 2014 avec l’attaque contre les communautés russophones d’Ukraine, s’inscrit dans le contexte stratégique plus large de l’expansion de l’OTAN en Europe de l’Est. Cette expansion a atteint l’« arrière-cour » (et, économiquement, l’espace commercial) d’une puissance militariste et autoritaire qui n’est pas disposée à tolérer des troubles dans sa sphère d’influence, comme le démontre la répression brutale des révoltes au Kazakhstan en janvier 2022.

Les conséquences les plus dramatiques sont subies directement par la population ukrainienne et par la jeunesse russe enrôlée, mais d’autres populations sont indirectement touchées. Les Africains doivent supporter l’augmentation du prix du blé et l’exacerbation des conflits régionaux, tandis que les exploités de l’Ouest sont soumis à une militarisation croissante de leurs territoires et à une dégradation de leurs conditions de vie et de travail.

Depuis 2014, l’Ukraine a vu se déployer de féroces réformes antirusses et antisociales, qui se sont encore durcies après l’invasion russe du 24 février 2022 : l’abolition du russe comme deuxième langue dans le sud-est de l’Ukraine ; l’exclusion des partis politiques qui auraient des liens avec la Russie lors des élections ; la répression contre les membres de l’Église orthodoxe russe ; les lois de « décommunisation » avec des peines allant jusqu’à 10 ans de détention pour le crime de « propagande communiste » ; la célébration du criminel de guerre Stepan Bandera, avec des cérémonies officielles et des monuments commémoratifs ; l’inclusion des nazis de Pravy Sector et de Svoboda dans les forces armées, en commençant par la Garde nationale et la création des tristement célèbres bataillons Udar et Azov ; la violence, les attaques, les viols, les homicides et les attentats à la bombe contre la population du Donbass (environ 14.000 morts entre 2014 et 2022, dont des centaines d’enfants) ; l’horrible massacre d’Odessa le 2 mai 2014, lorsque des manifestants non armés réclamant l’indépendance de l’Ukraine, qui s’étaient cachés dans le bâtiment du syndicat local, ont été massacrés et brûlés vifs par une foule de nazis armés escortés par la police. Ces authentiques provocations – qui ont porté atteinte au prestige international et au consensusnational de l’État russe en ciblant une partie de la population ukrainienne – sont à l’origine de la guerre.

Depuis 2014, l’Ukraine est devenue une sorte de fief des États-Unis, un État taillé sur mesure pour les multinationales et les capitaux occidentaux – ce que les États-Unis et leurs alliés n’avaient pas réussi à faire, même dans des pays qu’ils avaient directement envahis et sur lesquels ils exerçaient un contrôle militaire, comme l’Irak. À titre d’exemple, dès 2020, Zelensky a aboli le moratoire empêchant la vente de la terre noire fertile de l’Ukraine, livrant de fait des millions d’hectares à la culture des OGM de Bayer-Monsanto, tandis qu’au début de l’invasion russe, les conventions collectives négociées par les syndicats ont cessé de s’appliquer aux entreprises de moins de 200 employés (soit la grande majorité des entreprises ukrainiennes), et les grèves et les manifestations ont été interdites.

Nous considérons qu’il est dangereux et inquiétant que certains camarades, en Ukraine et ailleurs, soutiennent le gouvernement de Kiev et la « résistance ukrainienne » économiquement, avec de la propagande, et même militairement, sans un seul mot à ce sujet. Historiquement, depuis la Première Guerre mondiale, cet aveuglement découle de l’interventionnisme, la même peste morale qui, au lendemain du premier conflit mondial, a ouvert les portes à la montée du fascisme.

Le parallèle entre la « résistance ukrainienne » et la résistance partisane contre le fascisme nazi (et les luttes pour la liberté en général), qui est devenu si populaire dans les médias, est historiquement, politiquement et éthiquement inacceptable. Abstraction faite des profondes différences de contexte historique (et d’un petit détail : la présence de groupes nazis dans l’armée ukrainienne…), le parallèle est inacceptable en raison de la relation entre la fin et les moyens, entre l’objectif du combat et la manière dont il est mené. Dans la grande majorité des cas, les combattants partisans étaient des déserteurs qui luttaient contre l’armée officielle de leur propre État, alors que l’armée ukrainienne est une armée régulière contrôlée par le gouvernement. La participation à la lutte armée des partisans était libre et volontaire, alors que l’Ukraine applique actuellement la loi martiale et que ceux qui refusent de se battre finissent en prison. L’autonomie politique et militaire des groupes de partisans est également liée aux moyens de combat utilisés : fusils, mitrailleuses, grenades à main et bombes incendiaires peuvent être utilisés sans appareil coercitif centralisé, tandis que les drones contrôlés par satellite, les lance-roquettes, les chars et les missiles à longue portée reflètent une hiérarchie précise, à savoir la chaîne de commandement de l’OTAN.

La participation de certains anarchistes et militants de gauche à la guerre en cours les oblige à s’inscrire dans cette même hiérarchie : obéissance aux ordres, identification des objectifs par les services secrets occidentaux, subordination à un gouvernement très oppressif et aux intérêts du capital international. Rejoindre le front de l’OTAN, c’est renoncer à toute perspective révolutionnaire et internationaliste, et sur le plan éthique, c’est mettre de côté la critique des politiques autoritaires, répressives et anti-prolétariennes du gouvernement de Kiev.

Dire cela ne signifie pas du tout qu’il faille adhérer à la propagande russe sur l’« opération militaire spéciale » visant à la « dénazification » de l’Ukraine. Nous n’avons aucune sympathie pour l’odieux État policier imposé par le gouvernement russe à sa population ; nous ne sommes pas insensibles aux persécutions visant l’opposition et les anarchistes en Russie, et nous soutenons les nombreuses formes d’insubordination qui ont lieu dans la Fédération de Russie et au Belarus contre la guerre. De même que nous dénonçons le mythe trompeur de la « résistance ukrainienne », nous rejetons l’idée, répandue dans certains milieux (néostaliniens, populistes de droite et de gauche, etc.), que le bloc russo-chinois puisse avoir un rôle émancipateur global. Non seulement nous déplorons la mort des exploités au nom de leurs maîtres et dirigeants (même si ces dirigeants sont les ennemis de nos ennemis les plus proches), mais nous savons aussi que la guerre « constitue avant tout un fait de politique intérieure, et le plus atroce de tous » (Simone Weil). Lorsqu’un Etat fait la guerre, cet Etat fait aussi la guerre à sa propre population, et en particulier à ses propres prolétaires. La guerre renforce toujours le pouvoir des classes dirigeantes, en renforçant l’asservissement et l’exploitation des opprimés.

Ce à quoi nous assistons est aussi le chapitre d’une compétition plus vaste pour la suprématie technologique (où les États-Unis sont opposés au principal allié de la Russie : la Chine). Aujourd’hui, de nouvelles découvertes mortelles menacent la vie sur Terre comme jamais auparavant. Nombre des technologies déployées dans cette guerre – drones, systèmes de renseignement et de contrôle, intelligence artificielle et algorithmes prédictifs – sont testées sur le champ de bataille, puis reprises par les forces de police et les technocrates du monde entier.

« Si vous avez des idées ou de simples projets pilotes à tester avant la production en série, vous pouvez nous les envoyer et nous vous expliquerons comment procéder. Au final, vous obtiendrez le label ‘testé sur le terrain’. Les start-ups se retrouvent avec des produits compétitifs sur le marché parce qu’ils ont été testés sur le terrain. » Ces mots n’appartiennent pas à un fabricant « ordinaire » ou à un testeur de véhicules, de logiciels ou de thermostats numériques, mais au général Volodymyr Havrylov, vice-ministre ukrainien de la défense, s’adressant à la National Defense Industrial Association Future Force Capabilities lors de la conférence nationale qui s’est tenue à Austin, au Texas, le 21 septembre 2022.

Historiquement, le développement des technosciences conduit à la guerre et, inversement, la guerre implique inévitablement le développement des technosciences. La plupart des technologies actuelles sont intrinsèquement duales. La séparation entre recherche militaire et recherche civile, si elle a jamais existé, a aujourd’hui disparu. Il n’est donc pas surprenant que les technologies testées sur les champs de bataille soient ensuite utilisées contre les prolétaires dans d’autres parties du monde, y compris dans des pays en « paix ». L’utilisation et l’expérimentation de nouvelles technologies intensifient le contrôle sur les populations, rendant toujours plus difficile notre libération vis-à-vis de l’État et du capital.

Aujourd’hui, plus que jamais, l’importance politique d’un État est déterminée par sa capacité à mener à bien la recherche et le développement de nouvelles technologies de manière compétitive. Les industries technologiques influencent les décisions gouvernementales, de l’Occident démocratique au « socialisme de marché » de la Chine. Le conflit ukrainien, de par son ampleur et ses acteurs, accélère ce que l’on appelle la numérisation, qui est un objectif dans les agendas de nombreux États.

Comme c’est généralement le cas dans les conflits de cette ampleur, à chaque front extérieur correspond un front intérieur. La répression s’intensifie non seulement en Russie et en Ukraine, mais dans tous les pays participant à l’effort de guerre.

Les opérations de police et les formes spéciales de détention ont toujours été liées à l’intensification des conflits militaires. Leur objectif est de réduire au silence et d’éliminer toute possibilité de dissidence et de conflit réel. Nous le savons bien en Italie où, ces derniers temps, Alfredo Cospito a été soumis au régime carcéral 41 bis, où de nombreux périodiques et sites web anarchistes ont été fermés et où une série d’opérations répressives ont conduit à l’arrestation de dizaines d’anarchistes et de militants antagonistes. Cette contre-insurrection préventive est étroitement liée à la crise internationale du capitalisme et à la tendance à la guerre globale.

L’un des aspects essentiels de la guerre en Ukraine est la communication. Les médias ont souvent déformé la réalité sur le terrain ; citons, par exemple, certaines des « fake news » les plus flagrantes, comme l’attribution aux forces armées russes de la responsabilité du bombardement de la centrale nucléaire d’Enerhodar-Zaporijia et de la destruction du gazoduc Nord Stream. Mais ce à quoi nous assistons est bien plus qu’une information biaisée, il s’agit d’une véritable propagande de guerre. Cette propagande est conforme aux niveaux de conditionnement de masse qui ont été utilisés pendant le Covid pour imposer le récit dominant, et résonne tragiquement avec des épisodes de la Seconde Guerre mondiale : l’humiliation des Russes (avec, par exemple, les nouvelles risibles sur leur équipement prétendument obsolète et de mauvaise qualité) et leur diabolisation, la glorification de « nos héros » (y compris ceux ouvertement nazis), les illusoires « armes secrètes » qui changeront le cours des événements…

Ce type d’information fait apparaître que nous sommes en guerre, même si, pour l’instant, cette guerre ne se déroule pas près de chez nous. La guerre de l’information est avant tout une guerre contre notre cerveau, qui vise à nous enrôler et à nous convaincre que ce massacre est non seulement inévitable, mais aussi juste et avantageux. C’est pourquoi il faut préciser que les responsables de cette information font partie intégrante de la machine de guerre et doivent être traités comme tels.

Pour ces raisons, et pour bien d’autres encore, il est urgent de relancer l’initiative internationaliste afin de mettre un terme au carnage en cours et d’éviter de nouvelles escalades dangereuses.

Les ennemis ne sont pas les conscrits envoyés de force au front, ni les travailleurs du pays adverse, mais tous les maîtres, leurs gouvernements, leurs États et leurs armées. Pendant que nos sœurs et nos frères subissent les atrocités les plus brutales, il y a une bourgeoisie qui s’enrichit grâce à la production d’armes et qui spécule sur les conséquences de la guerre (le partage et la reconstruction de l’Ukraine, l’accueil sélectif des migrants, l’inflation, etc.).

Ramenons notre attention sur la critique de l’Etat et refusons d’être enrôlés sur un front quelconque, avec la conviction que la seule force qui peut arrêter la guerre est la mobilisation des exploités du monde entier.

Pour nous, l’internationalisme signifie le défaitisme, c’est-à-dire la critique de tous les gouvernements en commençant par « le nôtre », l’attaque contre tous les maîtres et bourgeoisies nationales en commençant par ceux qui nous exploitent tous les jours. Ainsi, de ce côté-ci du frontnous voulons faire de notre mieux pour nous opposer à l’OTAN (la principale alliance militaire au monde, et le bras armé du capitalisme occidental) et la saboter, tout comme nos frères et sœurs en Russie luttent contre la machine de guerre de leur camp (comme l’attestent les comptes-rendus d’attaques contre les infrastructures de transport militaire et les centres de recrutement), et tout comme d’autres frères et sœurs en Ukraine affrontent l’effort de guerre de leur gouvernement. Malgré la censure, nous savons qu’il existe en Ukraine des personnes qui diffusent de la propagande anti-guerre et de l’agitation, et qui s’opposent à la guerre dans la pratique, par exemple en aidant les fugitifs et les déserteurs à quitter le pays, ou en leur donnant un abri. Il s’agit là aussi d’un défaitisme cohérent.

En tant qu’anarchistes, notre position est défaitiste car l’histoire nous enseigne que c’est toujours et seulement sur les ruines de l’État que s’ouvrent des perspectives révolutionnaires pour les opprimés. Nous considérons le défaitisme comme un acte de solidarité envers ceux qui doivent payer directement le prix de la guerre, et comme un acte de vengeance de classe pour les souffrances endurées par nos sœurs et nos frères dans toutes les zones de conflit militaire. Nous nous sentons solidaires de toutes les victimes de la guerre dans tous les coins du monde, de ceux qui tentent de s’échapper et doivent affronter l’obstacle des frontières, de ceux qui meurent en voyageant par terre et par mer, et qui sont soumis à une exploitation brutale s’ils survivent.

Les tensions, passées et présentes, au Kosovo, à Kaliningrad et à Taiwan, les soulèvements au Niger, au Gabon et dans d’autres pays d’Afrique centrale s’inscrivent dans une tendance à la mondialisation des conflits et témoignent de l’importance des enjeux : si nous ne parvenons pas à détruire tous les fronts en attaquant chacun notre propre État et nos propres classes dirigeantes, l’anéantissement de l’humanité ou son asservissement impitoyable dans des conditions de guerre sans fin approchent à grands pas. A l’inverse, cela pourrait ouvrir des possibilités révolutionnaires.

Bien qu’aucun mouvement significatif d’opposition à la guerre n’ait vu le jour jusqu’à présent, il est important de souligner que, malgré la propagande incessante, une partie importante de la population, même en Occident, est opposée au soutien de l’effort de guerre. Il faut en tenir compte dans la perspective de la construction d’une mobilisation de masse.

Nous appelons donc à la construction d’une mobilisation radicale, internationale et généralisée qui devrait, en sabotant la guerre, aspirer à imposer la cessation des hostilités par le bas. Nous n’avons rien à demander aux gouvernements, ni à leur faire confiance, au contraire, nous sommes conscients que l’action directe des exploités du monde entier est la seule force réelle qui puisse mettre fin au massacre. C’est pourquoi nous pensons qu’il est nécessaire de s’opposer à la machine de guerre tant en Russie qu’en Ukraine, ainsi que dans les pays capitalistes occidentaux qui sont responsables de ce conflit et de toutes les principales guerres de ces trente dernières années.

  • Soutenons la désertion sur tous les fronts, en offrant refuge et solidarité à tous ceux qui se soustraient à la conscription militaire et refusent de participer au massacre !
  • Sabotons la machine militaire, bloquons la production d’armements et arrêtons les flux de logistique militaire !
  • Démasquons la machine de propagande. Dans cette guerre hybride, les médias font partie intégrante de l’appareil de guerre !
  • Opposons-nous à l’occupation militaire des territoires, en nous confrontant aux bases militaires, aux manœuvres militaires, à la militarisation de la vie publique !
  • Soutenons la nécessité d’une véritable grève générale qui, au-delà des aspects rituels et testimoniaux, stoppe concrètement l’industrie et la logistique des pays concernés !
  • Démasquons la connivence de l’université et de la recherche avec l’appareil militaro-industriel et les intérêts économiques capitalistes à l’origine de toutes les guerres !

LUTTONS POUR TRANSFORMER LA GUERRE DES PATRONS EN GUERRE CONTRE LES PATRONS

Rome, 2 septembre 2023

Anarchistes de Rome, Gênes, Carrare, Cosenza, Modène, Milan, Lecco, Turin, Ombrie, Trentin et Italie centrale.

Contact :