BIOGRAPHIE de l’anarchiste uruguayenne Débora Céspedes (1922-2009)

Une courte biographie de Débora Céspedes (1922-2009) par Nick Heath paru en anglais sur le site : Libcom.org

Débora Céspedes est né le 8 juin 1922 en Uruguay. Grâce à l’influence du vieux militant anarchiste Pedro Othaz, elle s’intéresse à l’anarchisme à l’adolescence. Quand elle avait 16 ans, grâce aux anarchistes Negro Palmieri et Matilde Carreras, elle a obtenu un emploi dans un kiosque à journaux dans un quartier résidentiel de Montevideo, et a rejoint la Jeunesse libertaire de l’Uruguay (JLU).

En 1937, elle commence à travailler à l’entrepôt de Frigorafico Anglo à Montevideo, où elle rencontre Esperanza Auzeac, une jeune anarchiste moldave avec laquelle elle entretiendra une solide amitié jusqu’à sa mort en Bolivie. elles ont organisé une société de résistance des travailleurs dans l’entrepôt et ont été licenciées pour cela.

Peu après avoir trouvé un nouveau travail dans l’entrepôt de stockage frigorifique d’El Nacional, où elle a continué son agitation sur le lieu de travail et a pris part à la fondation de la Fédération des travailleurs de la viande, pour laquelle elle a été secrétaire aux événements et pour laquelle elle a organisé des rassemblements. À cette époque, elle fréquentait le centre culturel de la Casa de los Libertarios et les locaux de l’Union des Bakers, qui était très proche. Elle a participé à la rédaction et à la distribution du journal Voluntad et a contribué à la création de l’athénée anarchiste dans le quartier d’El Cerro. Elle a participé au groupe de théâtre Emile Zola, composé de travailleurs masculins et féminins dans les entrepôts de loisirs, et a joué dans plusieurs pièces de théâtre.

Pendant la Seconde Guerre mondiale, elle a pris une part active à la propagande contre la création du service militaire obligatoire (SMO), une campagne menée par le Comité de liaison des syndicats autonomes, la JLU et la Fédération des étudiants universitaires d’Uruguay (FEUU), et contre les groupes parlementaires des partis socialistes et communistes qui ont accepté cet SMO. En 1947, elle fui la répression et elle s’exile à Buenos Aires, en Argentine, avec son partenaire Luis Alberto Gallegos, surnommé Beto, qu’elle avait rencontré dans la JLU.

Ils se sont tous deux impliqués dans l’anarchiste de la FOA, ainsi que dans la Fédération libertaire argentine (FLA), où ils ont collaboré avec des militants comme Jacobo Prince, Jacobo Maguid, Humberto Correale, Juanita Quesada, Diego Abad de Santillán et José Maria Lunazzi.

En 1963, le couple retourne à Montevideo. Débora rétablit l’amitié qu’elle avait entretenue depuis 1938 avec l’anarchiste italien Luce Fabbri. Après la scission entre partisans et adversaires de la Révolution cubaine au sein de la Fédération anarchiste uruguayenne (FAU), elle a démissionné de l’organisation avec Luce Fabbri, José B. Gomensoro, Iriondo, De Ottone, les frères Errandonea et Cresatti. Elle a fondé l’Alliance libertaire d’Uruguay (ALU), opposée au soutien du castrisme, qui a disparu à la suite de la mise en place de la dictature militaire. Pendant la dictature militaire, elle a pris part aux activités du Centre d’action populaire (CAP) qui a réuni des anarchistes et des gens de gauche qui voulaient organiser des communes autonomes.

Avec la chute de la dictature, elle crée avec Luce Fabbri le Groupe des études et actions anarchistes (GEAL), qui en 1985 remplace l’ALU, et son journal, Opción Libertaria (1986 à 2004), un nom proposé par Céspedes. Elle a également joué un rôle important dans la tentative frustrée de créer une coordination anarchiste entre les mouvements anarchistes argentin et Uruguayen (Coordinadora Anarquista Rioplatense), dans laquelle ont également participé, entre autres, Lunazzi, Corral et l’Athénée de Avellaneda. Entre mars 1974 et février 2001, elle a été rédactrice en chef du bulletin mensuel de Montevideo, Centro Oeste, dont 1 000 exemplaires ont été publiés. Elle a également collaboré au magazine féministe argentin La Medio del Cielo, réalisé par l’écrivain et actrice Leonor Benedetto. Entre 1991 et 1998, elle a collaboré à l’organisation d’une coopérative de consommateurs qui comptait 80 groupes, composés chacun de 12 familles. Elle et Beto animèrent également la bibliothèque Luce Fabbri. Poétesse depuis l’âge de 10 ans, elle publie des poèmes dans de nombreux journaux et reçoit différents prix en Uruguay et en Argentine.

Elle est décédée à Montevideo le 18 mai 2009, et son partenaire Beto l’a suivie un an plus tard.
En 2003, Hugo Fontana publie Historias Robadas. Beto y Débora, dos anarquistas uruguayos. La ville de Montevideo a nommé, de son nom, le parc municipal de Thea en 2020.

Nick Heath

Sources :
https://www.montevideooeste.org/figuras-iconicas/debora-cespedes/
https://archivo.kaosenlared.net/d-bora-c-spedes/

Note de lecture : P4 LES PIGNONS NOIRS, Editions de La Pigne

P4 Les pignons noirs

Les trois jours

Dans ce petit livre sont réunis les témoignages de quelques allergique à l’armée, qui se sont vus convoqués aux « trois jours » – qui n’en font plus qu’un et demi – un temps largement suffisant pour leur ôter toute velléité de céder aux invites  des militaires en charge de les évaluer.

Le statut des objecteurs est récent, et largement discriminatoire, d’une durée double de celle du service militaire (deux ans au lieu d’un), et incluant une première année au service d’ l’ONF.

Donc que faire ? Devenir insoumis ? Ou opter pour la réforme…

A 19, 20, 25 ou 27 ans, on est généralement bien portant, l’examen médical au programme des trois jours est complet et sourcilleux. Reste l’exemption pour problème psychologique, psychiatrique, inadaptation à la vie en collectivité…

Chacun des signataires des  témoignages a choisi de tenter sa chance sur ce terrain, et a réussi. Dans la grande majorité des cas, le rôle a été longuement préparé et documenté. 

Les récits sont drôles, on sourit, et même on rit, devant l’incroyable absurdité de la chose militaire. 

Mais ce n’est pas exactement pour cela que ces jeunes gens ont choisi de ne pas « faire l’armée » et  « devenir un homme, un vrai » (alcool, tabac, filles etc…). Non, ils ont refusé d’obéir, de marcher au pas, d’apprendre à se servir d’armes et de tuer. Car au-delà du folklore entendu dans les conversations de comptoir, vantant la rigolade franchouillarde, l’armée enseigne comment donner la mort.

Entre les témoignages, des poèmes, dont un de Gaston Couté, et en entrée un beau texte « Cabu était contre » (signé par Jean-Luc Porquet) dont voici des extraits :

« Quand le 1er mars 1958 le jeune Cabu, 20 ans, se retrouve dans un bateau pour Oran, en compagnie de centaines d’autres appelés, il n’a jamais fait de politique. Il n’a pas lu {La question} de Henri Alleg. Il ne connaît rien à la guerre d’Algérie – appelée « opération de pacification ». C’est juste un joyeux luron qui est devenu une petite vedette de Châlons-sue-Marne grâce à son coup de crayon… […]

Quand, plus de deux ans plus tard, le 6 juin 1960 il est sur le bateau qui le ramène en France, il pleure de joie. Mais c’est un autre homme. […] Il a vu de près la connerie militaire, le racisme anti « bougnoules », les beuveries, l’horreur. Il a vu la fumée des villages incendiés la nuit. Il a ramassé les cadavres de fellaghas dans les champs après les « opérations ». Il a entendu les hurlements des torturés de sa caserne. […] Il n’a, heureusement, jamais eu à tirer sur personne. Il a compris que cette « opération de pacification » menée par 350 000 appelés était une guerre coloniale et criminelle. Il est devenu antimilitariste. Il ne pense pas que l’armée soit un mal nécessaire. Il pense que la nature même de l’organisation militaire mène à la guerre. Il est pour le désarmement unilatéral. Il est pacifiste. Il est non violent. C’est pour la vie. »

Léonore

P4 Les pignons noirs – Éditions de la Pigne

ilDeposito – NOTRE « MANIFESTE » CULTUREL ET MUSICAL

ilDeposito.org est un site internet qui vise à être une archive de textes et de musique de chants de protestation politique et sociale, des chants qui ont toujours accompagné la lutte des classes opprimées et du mouvement ouvrier, qui représentent un patrimoine politique et culturel de valeur fondamentale, à préserver et à faire revivre.


Dans ces chants est enfermée et rassemblée la tradition, la mémoire des luttes politiques et sociales qui ont caractérisé l’histoire, en Italie mais pas seulement, avec toutes les contradictions typiques du développement historique, politique et culturel d’une société.


De la Révolution française au risorgimento, en passant par les chants antipiémontais. Des hymnes anarchistes et socialistes du début des années 900 aux chants de la Grande Guerre. De l’après-guerre, aux chants de la Résistance, en passant par les chants antifascistes. Et puis l’après-guerre, la reconstruction, le « boom économique », les luttes étudiantes et ouvrières de la fin des années 60 et des années 70. La période du reflux et enfin le monde actuel et la « globalisation ». Chaque période a eu ses chants, qui sont plus que de simples bandes sonores : ce sont de véritables documents historiques qui nous permettent d’entrer au cœur des événements, en passant par des chaînes non traditionnelles.


Notre approche théorique reprend donc la définition par De Martino et Gianni Bosio de la culture populaire en tant que culture indépendante de la culture dominante, qui a tendance à porter les valeurs et les façons de concevoir le monde des classes au pouvoir. Le contenu du dépôt, à notre choix, a toujours un contenu politique ou en tout cas de « dénonciation sociale ». Bref, il n’y a pas de chants de la tradition orale et populaire avec un contenu qui n’est pas comme celui qui a tendance à être défini.


Nous savons que ces catégories ne peuvent jamais être définies de manière absolue et pérenne, mais ce sont des catégories dialectiques, qui changent dans le temps et l’espace. Mais, aux fins d’un travail de collecte et de réintroduction comme celui que nous portons, ces catégories ont certainement leur propre fonctionnalité, et c’est dans cet esprit que nous les utilisons. En ce qui concerne la relation avec la musique populaire, il y a certainement des chansons populaires, mais, comme le titre le dit du site, des chansons de protestation politique et sociale. C’est pourquoi les chants nettement politiques de la grande « famille » de la musique populaire sont présents, dans le sens auquel on a déjà fait référence.


Le répertoire et la tradition auxquels il est fait référence, pour les chants de la Seconde Après-guerre, sont ceux liés d’une part aux recherches effectuées par le groupe Cantacronache d’abord, et du Nouveau Cancionier italien par la suite. De l’autre côté, la nouvelle chanson politique a suivi, certainement liée à la fois à l’expérience des Cantacronache et du Nouveau Canzoniere Italiano. Mais aussi le répertoire des nombreux Canzonieri directement liés aux réalités de la lutte de ces années (je fais référence au Canzoniere Pisano, au Canzoniere del Proletariato, etc).


En revanche, il ne s’agit pas, comme déjà mentionné, d’une collection générique de chants politiques. De grandes ausences s’attendraient : le répertoire de Guccini, de De Andrè, ou de De Gregori, et bien d’autres (répertoire qui nous est loin d’être indifférent !). Il y a une raison à cette « lacune ». Il y a des limites objectives, comme le manque physique de personnes qui collaborent sur le site, car l’élargissement des archives dans ce sens serait une lourde charge de travail. Mais nous pensons aussi que des auteurs-compositeurs comme Guccini, De Andrè etc, ont (à juste titre) eu leur place dans les médias, à la télévision, dans les magasins de disques, dans les librairies et même sur internet. Notre engagement est donc de valoriser et de proposer un brin de la chanson de protestation qui est désormais pratiquement ignoré par certains canaux, tant culturels que commerciaux. Pour certains, cela peut sembler un choix non acceptable, mais nous pouvons vous assurer qu’il s’agit d’un choix conscient et motivé.


Ce que nous espérons, c’est que le Dépôt et tous les projets promus, puissent servir à la redécouverte, à la diffusion et à la valorisation de ce répertoire, non seulement comme une récupération d’un matériel passé et lié à des expériences historiques passées, mais aussi comme un stimulus pour la reprise d’un chant politique qui est en quelque sorte lié à une tradition existante, une tradition importante et significative.

CHANTS DE LUTTE ET RÉVOLUTION

Quand les gueux, les sans-noms, les crève-misères, etc., se mettent à reconnaître leur ennemi social, bourgeois, riches, profiteurs, curés, patrons, militaires, politiciens, etc., qui vivent de leur sueur… alors le vieux monde vacille sur ses bases et notre chant de libération clame, en mille langues, en mille lieux, que les prolétaires n’ont rien à perdre que leurs chaînes, qu’ils ont un monde à gagner.

Mais les nantis et les exploiteurs se défendent. Ils ont intérêt, de façon antagonique à la nôtre, à entretenir notre amnésie sociale, à occulter nos incessantes résistances, à réécrire sans cesse l’histoire réelle de notre vie. Ce qu’ils appellent « culture » est une puissante arme de distraction massive !

Anarchie, vous avez dit anarchie
Gaston Couté
Georges Brassens

et bien d’autres chants : https://www.cira-marseille.info/wp-admin/post.php?post=25726&action=edit